Vélomagus, récit d'un vélotafeur accidenté.

Après l'hôpital

Le début du long parcours administratif commence à partir à ce moment là.
En sortant, je demande s'il faut faire une quelconque démarche de sortie. On me répond que non. Je suis assez étonné mais je suis, à vrai dire, encore trop choqué pour y prêter une attention particulière. Parce que depuis ces dernières 48 heures, ayant échappé à la mort, je me fous mais complètement de tout cela.
Ajoutons à cela ma principale préoccupation : je vais revoir mes enfants!
Plusieurs rendez-vous on été pris avant mon départ :
  • Je dois rencontrer le CASA (Centre d’Accueil Spécialisé pour les Agressions) qui est une maison médico-judiciaire qui constatera mes blessures dans les détails via l'examen d'un médecin légiste.
  • Un rendez-vous avec un orthopédiste du CHU pour savoir si tout va bien du côté du genou et au service ORL du CHU pour le nez.
  • Et enfin un rendez-vous avec le brigadier de police judiciaire en charge de l'enquête.
Je sors donc, je suis heureux de sentir l'air frais, je n'ai que ma jambe qui ne va pas et des pansements qui couvrent pour beaucoup mon visage mais qu'importe. J'envoie un SMS à ma compagne, dans 5 minutes nous serons là.
Puis arrive le moment tant attendu. Chez nous, là où on se gare, la maison est en contre-bas. Ce qui fait que d'une des grandes fenêtres de la façade on peut voir les personnes qui arrivent. Là c'est moi qui arrive. Je descends et je vois deux petits yeux bleus dépassant du bas de la fenêtre. Une fois rentré, non, on ne peut pas dire qu'il se jette dans mes bras et je m'y attendais. Mais au lieu de voir une tête effrayée, je lis dans sa façon de me dévisager comme une multitude de questions. Alors on a parlé. Il m'a demandé si ça me faisait mal, pourquoi il y avait des pansements. De mon côté je le rassure en lui disant que ça s'améliorera et que des infirmiers viendront tous les jours panser mes plaies.
Les jours suivants seront rythmés par de grandes périodes de sommeil réparatrices, les visites des infirmiers et celles des proches et amis. Je suis gâté de toute part, on m'offre beaucoup de choses que j'aime, juste histoire de profiter encore plus de ces bonheurs que j'ai faillis perdre.

Depuis mon retour j'ai décidé que je ne ferai pas de grasses matinées pour aider (à ma mesure) ma compagne à préparer les enfants pour l'école ou la crèche. Bien évidement, dès leur départ je tombe de sommeil.
Minimagus encaisse assez bien. Ma compagne l'a bien préparé à mon retour. Il a bien observé le travail des infirmiers de telle sorte qu'il joue à me soigner. Drôle de sensation pour moi qui, jusqu'alors, était un des garants de son bien être : voilà que c'est lui qui s'occupe de moi. Quand à Micromagus, vu son jeune âge, il est difficile de détecter un changement. Cependant, nous ne sommes pas dupes. Tout cela a impliqué de soudains changements dans la maison, il semble évident qu'il ai encaissé à sa manière.

Un fait marquant est le jour du réveillon du nouvel an. Nous étions reçus chez des amis qui nous avaient laissé le choix de venir ou pas en fonction de ma forme. L'idée même de passer le réveillon en fête a eu une saveur particulière. Je me suis beaucoup amusé, malgré les douleurs, les pansements et les béquilles. Seulement (et ce genre de pensée ne me quittera jamais), je ne peux m'empêcher de penser que l'ambiance aurait pu être tout autre. Pour la première fois, je me pose les questions sur ce qu'aurait été la vie si j'avais été très gravement touché, voire mort. Non pas que je craigne de mourir, mais quel aurait été le devenir de ma compagne et de mes enfants?
 
Les enfants... Dire qu'ils n'ont pas été touchés serait faux, mais ils n'ont pas tout à fait réalisé ce qui s'était passé. Du coup, le cour de leur vie a repris assez vite, m'emportant dans son tourbillon. Et j'avoue qu'ils ont été parmi mes meilleurs coachs pour passer à autre chose.
 
Quelques temps après j'ai été invité à me rendre au CASA pour un compte-rendu légiste. La médecin est adorable, d'une empathie qui laisse entrevoir qu'elle doit en voir des vertes et des pas mûres dans son cabinet. L'examen est assez déroutant car il détaille de manière exhaustive TOUTES les conséquences physiques de l'accident. Comme une autopsie, mais avec le gars vivant présent. Cet examen est absolument indispensable pour faire valoir tout ce qui peut être versé au dossier de l'enquête. Au regard de mon état, elle estime mon ITT (Interruption Temporaire de Travail) à 15 jours ce qui est faible. Mais honnête. Car en vérité c'est vrai, c'est insolent comme je m'en sors bien. Elle m'explique quand même que cet ITT est temporaire car il est impossible de savoir ce dont souffre mon genou car il est enflé. C'est donc l'orthopédiste du CHU qui nous en dira plus.

Avant l'orthopédiste, je revois l'ORL qui m'a opéré le nez aux urgences vitales. Il a fait du très bon travail, les sutures sont nettes et propres. Cependant, après 
auscultation il me met face à un dilemme : Mon nez, ayant été cassé lors du choc contre le trottoir, a été légèrement dévié à sa base. C'est presque invisible, il faut le savoir pour le détecter. Le problème c'est que, si je veux le redresser, il faut le faire tout de suite car les os n'ont pas encore eu le temps de se ressouder. Et pour y parvenir, cela nécessite une atèle qui prends appui sur tout le visage. Or mon visage ne peut supporter un pareil traitement car il est couvert de sutures qui ne sont pas cicatrisées.  Il me fait comprendre que le redressage de mon nez se fera donc plus tard, mais qu'il faudra tout recasser car entre-temps les os et le cartilage auront, eux aussi, repris leur petite vie. A ce moment, comme mon nez n'est vraiment pas beaucoup dévié, je comprends que je garderai cette séquelle pour le restant de mes jours.
Puis vient le rendez-vous avec l'orthopédiste. Après une radio du genou gauche et une auscultation, il m'annonce que mon genou n'a rien, qu'il dégonflera au fur et à mesure. Je n'en reviens pas d'avoir autant de chance c'est génial.

Plus tard, je serai dans l'obligation de retourner de nouveau à l'hôpital pour r
égler les problèmes administratifs consécutifs à ma sortie. En effet, et vu que personne ne m'en avait informé, il aurait fallu passer par la case administration. On a poireauté un bon moment avec mon père qui m'accompagnait, mais bon j'avais bien compris désormais ce que voulait dire le mot "Patient".